Il fait mĂ©ga ultra chaud, on colle sur les banquettes dâautobus, on transpire Ă qui mieux mieux et on rĂȘve de (virgin) mojitos et de cornets de molle (sans lactose, sivouplĂą). Cela dit, et malgrĂ© ce temps caniculaire, une pensĂ©e demeure : on associe volontiers le temps chaud avec hausse de libido. Pourquoi ?
Mais avant de se lancer, voici quelques petites nouvelles en vrac :
Je rĂ©ponds Ă la question dâune auditrice sur le plaisir sexuel fĂ©minin et masculin ainsi quâĂ une interrogation sur le consentement pour Moteur de recherche;
Je parle de post-pornographie dans le magazine Urbania;
Les plus rĂ©cents Ă©pisodes de Je demande pour un ami portent sur la sexualitĂ© et la santĂ© mentale et lâorgasme fĂ©minin.
Sur ce, bonne lecture! đ
Dans notre imaginaire collectif nord-amĂ©ricain, chaleur Ă©quivaut souvent Ă corps dĂ©nudĂ©s et bronzĂ©s, Ă sexualitĂ© et flirt Ă gogo. Comment se fait-il que, pour de nombreuses personnes, lâenvie de forniquer (oui oui) soit dans le tapis ? Ne rĂȘve-t-on pas de piscine plutĂŽt que dâĂ©bats suintants ? Est-ce que lâĂ©tĂ© rime vraiment avec sexualitĂ© dĂ©cuplĂ©e ?
Eh bien, ça dĂ©pend pour qui. Et, selon quelques Ă©tudes rĂ©centes, il semble quâil y a plus de chances que la sexualitĂ© soit plus restreinte quâexacerbĂ©e, Ă©tant donné⊠les changements climatiques. Câest effectivement la rĂ©alitĂ© actuelle. Les vagues de chaleur trĂšs intenses, voire dangereuses pour la santĂ© sont dĂ©jĂ le lot de nombreuses populations dans le monde. On ne peut donc pas passer Ă cĂŽtĂ© de cela.
Mais entrons dans le vif du sujet en explorant 1) pourquoi la saison estivale peut inspirer les gens Ă vouloir plus de sexualitĂ© et 2) les raisons qui font en sorte quâon peut en vouloir (beaucoup) moins.
1) Quand lâĂ©tĂ© est sexu
Dans le quotidien espagnol El PaĂs, on sâest penchĂ© sur la question et on met de lâavant le concept de la « trinitĂ© du dĂ©sir » que je trouve fort intĂ©ressante et qui rejoint mes observations en clinique. Cette triade comprend : les hormones, les vitamines et les vacances.
Les hormones dans le tapis ? đ
Quand nous sommes exposé·e·s au soleil, nous sĂ©crĂ©tons plus de sĂ©rotonine, aussi appelĂ©e la fameuse « hormone du bonheur ». Comme lâexplique Marc HĂ©bert, directeur du laboratoire d'Ă©lectrophysiologie visuelle et de photobiologie de l'UniversitĂ© Laval au micro de Moteur de recherche, il sâagit plutĂŽt dâun neurotransmetteur. Pour donner un exemple, lorsque lâon prend des antidĂ©presseurs, souvent des ISRS (inhibiteurs sĂ©lectifs de la recapture de la sĂ©rotonine), « ceux-ci vont aider Ă augmenter le niveau de la sĂ©rotonine et amĂ©liorer lâhumeur.» Ainsi, le temps passĂ© au soleil peut contribuer Ă augmenter notre sensation de bien-ĂȘtre.
SâĂ©vader pour mieux revenir dans son corps et sa tĂȘte đ
Pour plusieurs personnes, lâĂ©tĂ© est la pĂ©riode oĂč lâon arrive au moment tant attendu des vacances. Et qui dit vacances, dit (dans un monde idĂ©al) relaxer, lĂącher prise et prendre du temps pour soi. Cela peut grandement aider Ă sortir de la routine prenante et revenir, dâabord, Ă son corps, mais aussi Ă des hobbys et passions quâon met souvent de cĂŽtĂ© Ă cause de nos vies folles, que ce soit lire, jardiner, Ă©crire, faire du sport, peindre, cuisiner, voyager, etc. Tout ceci peut aider Ă se sentir Ă©panoui·e, se sentir bien et donc, dâĂȘtre enligné·e sur soi et ses besoins. Et quand on est bien dans son corps et sa tĂȘte, câest souvent de lĂ que dĂ©coule lâenvie de sâĂ©rotiser soi-mĂȘme et dâĂȘtre Ă©rotisé·e.
La vitamine Dâïž
Ătant donnĂ© notre rĂ©alitĂ© quĂ©bĂ©coise, plusieurs personnes vivent une carence en vitamine D. On estime quâenviron « 13 millions de Canadiens manquent de ce nutriment essentiel ». En effet, la plus grande source de vitamine D est⊠le soleil. De nombreuses personnes attendent dâailleurs impatiemment la pĂ©riode estivale, car elle reprĂ©sente un moment oĂč le bien-ĂȘtre physique est augmentĂ©. Pas pour rien quâun Ă©tĂ© pluvieux en dĂ©senchante plus dâun·e. Le manque de vitamine D peut avoir un impact sur lâhumeur, causer de la fatigue et des douleurs musculaires et osseuses, entre autres. Il est donc normal et probable que lâon se sente mieux lâĂ©tĂ©, Ă©tant donnĂ© lâapport direct de vitamine D quâil est possible dâaller chercher. Ce qui ne veut pas dire pour autant quâon doit adhĂ©rer aux discours de certain·e·s influenceureuses qui proposent dâĂ©viter la crĂšme solaire pour faire le plein de cette vitamine. Cette tendance est tout simplement DANGEREUSE et nâa aucun fondement scientifique.
De façon gĂ©nĂ©rale, le beau temps, les horaires allĂ©gĂ©s, la sortie du bureau le soir alors quâil y a encore de la lumiĂšre, les 5 Ă 7 qui se multiplient, les moments de farniente sont tous des Ă©lĂ©ments qui incitent les gens Ă sortir plus. LâĂ©tĂ© offre souvent plus dâopportunitĂ©s de rencontres et une spontanĂ©itĂ© quâon retrouve un peu moins lâhiver, avec les dĂ©placements Ă rĂ©flĂ©chir dâavance et les nombreuses couches Ă se mettre sur le dos. La sexualitĂ© peut donc tout Ă fait sâinviter plus frĂ©quemment dans le quotidien et dĂ©voiler des aspects plus attrayants pendant cette pĂ©riode.
2) La sexualité au second rang
Quand chaleur ne rime pas toujours avec bonheur đ„Ž
Lors de vagues de tempĂ©rature extrĂȘmes, comme on en vit (et vivra) de plus en plus, il est normal que la sexualitĂ© ne soit pas le premier besoin Ă apparaĂźtre. Avoir des relations sexuelles demande un effort physique non nĂ©gligeable. Cela crĂ©e encore plus de chaleur corporelle, fait augmenter le rythme cardiaque et amĂšne une augmentation de la sudation. Si on se sentait dĂ©jĂ Ă©crasé·e par la chaleur, ce nâest probablement pas la solution la plus adĂ©quate pour amĂ©liorer son Ă©tat. Ce qui ne veut pas dire que câest proscrit! Mais la canicule demande Ă toustes de faire plus attention Ă son Ă©tat de santĂ© pour Ă©viter les trop grands efforts physiques qui peuvent crĂ©er dĂ©shydratation et coups de chaleur, par exemple.
De plus, de nombreuses personnes utilisent divers mĂ©dicaments et traitements qui peuvent affecter le corps, particuliĂšrement en pĂ©riode estivale. Par exemple, plusieurs types de mĂ©dication, que ce soit des antidouleurs, des antidiabĂ©tiques, des antidĂ©presseurs, des antiviraux, des relaxants musculaires, des immunosuppresseurs, etc. ont des effets importants sur le mĂ©tabolisme. Pensons aux substances photosensibilisantes, Ă celles qui peuvent crĂ©er de lâhypotension ou de lâhypertension, de la dĂ©shydratation, un assĂšchement de la bouche, de la diarrhĂ©e, des nausĂ©es, de la difficultĂ© Ă rĂ©guler adĂ©quatement la tempĂ©rature du corps, etc. De plus en plus de gens ont Ă vivre avec des situations de santĂ© diverses et chroniques, il faut sâen rappeler.
La dĂ©prime saisonniĂšre⊠câest pas juste en hiver! đ«„
Ce que lâon appelle aussi « trouble affectif saisonnier » est surtout associĂ© Ă temps froid et sombre. Mais la dĂ©prime saisonniĂšre, câest aussi en Ă©tĂ©! Câest dâailleurs Ă cause de cette croyance rĂ©pandue que lâĂ©tĂ© est LA saison festive et lâfun pour tout le monde que les personnes qui vivent de moins bons moments estivaux rencontrent des difficultĂ©s Ă recevoir comprĂ©hension et empathie. « Voyons, y fait beau! Enjoy! » Oui, mais non.
En plus dâĂȘtre une excellente chanson de Lana Del Rey, la summertime sadness est bien rĂ©elle. Selon diverses Ă©tudes discutĂ©es dans la revue Scientific American, elle peut crĂ©er de lâirritation, une forme de lĂ©thargie et augmenter les symptĂŽmes dĂ©pressifs, entre autres.
La saison des comparaisons đ
LâĂ©tĂ©, câest aussi un moment clĂ© pour partager ses photos de voyage, ses marches en nature, ses sorties en gang, ses nouveaux achats colorĂ©s, ses selfies en maillot, ses BBQ qui font saliver et ses photos de couple qui font rĂȘver. Câest aussi la saison des mariages et des fiançailles, des gender reveal et cie. Il est tout Ă fait normal de se sentir overwhelmed devant tant de contenus qui peuvent dĂ©noter de grandes disparitĂ©s sociales et mettre de lâavant des privilĂšges importants. Ătre constamment exposé·e Ă de tels publications via les plateformes sociales peut avoir comme consĂ©quence de souligner Ă gros traits ce Ă quoi on nâa pas accĂšs dans lâimmĂ©diat (ou pour toujours, dans certains cas), quâon parle de sâoffrir un voyage ou de pouvoir jouir dâun corps ou dâune configuration amoureuse que lâon cĂ©lĂšbre au mĂȘme titre que ceux que lâon dit « normatifs ». Il ne faut donc pas se surprendre si bien des gens font une pause sentie de ces rĂ©seaux qui, bien quâils comportent de nombreux bĂ©nĂ©fices, peuvent aussi crĂ©er des fractures sociales et Ă©motionnelles importantes.
You do you đ«¶
Quâon soit team #plusdesexe ou team #pasdesexe (et tout ce qui vient entre ces deux catĂ©gories, bien sĂ»r) en Ă©tĂ©, lâimportant, câest de savoir ce qui est bon pour soi et Ă©couter ses besoins. On ne devrait pas se crĂ©er de pression Ă choisir entre deux camps (parce que la vie est tellement plus quâune simple binaritĂ©) et on peut se donner le droit dây aller avec ce qui nous convient. Parce que le summer love, ça peut autant ĂȘtre dây aller Ă fond les ballons partout tout le temps si câest ce qui nous fait du bien ou de choisir dâĂȘtre bien tranquille Ă siroter sa limonade en solo et Ă la clim, tout en lisant un bon livre. Ou tout ça en mĂȘme temps (why not, coconut!). Comme on dit en bon français, you do you (Saint-Tropez, pour les oldies comme moi qui vont catcher.)
La saison estivale en cliniqueđ©ââïž
Jâavais aussi envie de vous glisser un mot sur la pratique sexologique clinique en Ă©tĂ©. Parce quâen devenant sexologue que jâai pu me familiariser avec une rĂ©alitĂ© bien particuliĂšre. En effet, no show, annulations, voyages, vacances ; jâai dĂ©couvert que si la nuit, tous les chats sont gris, lâĂ©tĂ©, toute la clientĂšle est partie! JâexagĂšre un peu, mais il est tout de mĂȘme vrai que les horaires au ralenti sont le lot de plusieurs de mes collĂšgues et moi-mĂȘme. Cela mâa dâailleurs demandĂ© de mâajuster en consĂ©quence. (i.e ĂȘtre en vacances une partie de lâĂ©tĂ© et prendre dâautres contrats pour compenser financiĂšrement, puisque je ne fais pas de pratique Ă temps complet.)
La saison dâĂ©tĂ© fait Ă©merger un certain Ă©lan chez de nombreuses personnes qui se sentent mieux, sont plus en capacitĂ© de se rĂ©guler et de se prendre en main. MĂȘme si cela amĂšne moins de boulot, mon travail est de faire en sorte que les gens aillent bien. Câest rĂ©jouissant de constater que beaucoup de gens retrouvent une certaine Ă©nergie et une capacitĂ© Ă prendre soin dâelleux. Cela dit, ce nâest pas tout le monde Ă qui cela arrive, car cela dĂ©pend des motifs de consultation et de la situation de chaque personne. Mais il reste quâon peut tout de mĂȘme observer une tangente estivale Ă allĂ©ger les suivis thĂ©rapeutiques. Mais - et je lâai appris au fur et Ă mesure de ma pratique - cela peut aussi vouloir dire tout autre chose, comme⊠lâĂ©vitement.
Si lâon associe volontiers Ă©tĂ© Ă lĂ©gĂšretĂ©, câest quâil est inscrit dans nos coutumes de rechercher de lâentertainment, saupoudrĂ© dâun peu dâinsouciance. On le sait; la saison estivale, câest toutes les comĂ©dies romantiques, les films dâaction oĂč lâon dĂ©branche son cerveau, sans oublier les lectures estivales, dites souvent « de plage » qui ont comme mission de nous divertir sans demander trop dâefforts. Et câest bien correct de rechercher un peu de cette libertĂ© mentale. On le dit dâailleurs souvent : jâai besoin de mâĂ©vader du quotidien.
Ce nâest pas nĂ©cessairement diffĂ©rent en clinique. On peut vouloir fuir un peu lâobligation hebdomadaire, bi-hebdomadaire, mensuelle ou ponctuelle de voir sa ou son thĂ©rapeute. Câest tout Ă fait normal. LâĂ©vitement et la fuite ne sont pas toujours de mauvaises choses. En fait, câest parfois nĂ©cessaire pour prendre du recul et rĂ©Ă©valuer ses besoins. Câest dĂ©jĂ un grand effort de sâinvestir dans une thĂ©rapie, ça demande du courage; on a parfois besoin dâune pause pour assimiler tout ce qui bouge, Ă©merge, chamboule, etc. Comme thĂ©rapeute, je dois juste mâassurer que ce type dâĂ©vitement ou de fuite nâempĂȘche pas la reprise du suivi et quâil est bĂ©nĂ©fique Ă la personne pour mieux (rĂ©)Ă©valuer ses besoins et ses objectifs. Question de revenir en sĂ©ance pour poursuivre le travail entamĂ©. Je tiens aussi Ă souligner que ce sont mes observations bien personnelles qui pourraient ĂȘtre diffĂ©rentes chez mes collĂšgues sexologues qui travaillent avec dâautres clientĂšles.
Et vous, comment se passe votre Ă©tĂ© ? Votre sexualitĂ© sâen ressent-elle ? Que ce soit positivement, nĂ©gativement ou autre ?
Peu importe comment se vit votre intimitĂ© sexuelle en pĂ©riode de canicule, gardez en tĂȘte dây aller avec vos capacitĂ©s et vos envies. Il nây a aucune prescription Ă suivre face Ă cela, sinon celle de faire attention Ă vous et dâexplorer ce qui vous correspond et vous rend Ă lâaise.
à découvrir
Si vous ĂȘtes amateurices de true crime et dâhistoires glauques, vous risquez fort dâapprĂ©cier ce balado tout droit sorti de chez Wondery et Ballen Studios. Mr. Ballen, qui a dĂ©jĂ le trĂšs populaire balado MrBallen: Strange, Dark and Mysterious Stories, propose cette fois une sĂ©rie de rĂ©cits plutĂŽt horrifiques sur des mystĂšres mĂ©dicaux qui ont eu lieu Ă diverses Ă©poques. Ăa sâĂ©coute comme on lit un roman policier particuliĂšrement haletant et ça se digĂšre bien avec son format entre 30 Ă 40 minutes. Call me crazy, mais moi ça mâaide Ă mâendormir.đ€·ââïžOn peut Ă©couter ça juste ICI. Ou juste ici :
Câest tout pour cette infolettre, on se revoit trĂšs bientĂŽt.
Bon mois de juillet! đ
Myriam
Oldie ici qui a compris la rĂ©fĂ©rence Ă St-Tropez ET qui Ă©coute le mĂȘme podcast de true crime en boucle pour sâendormir đ đđŒââïž